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Editrice au bord de la crise de nerfs
9 octobre 2007

Non

Non.
Pourquoi elle a dit non cette conne ?
Pourtant, tout avait si bien commencé...

Flashback
12 février 2007 - 23h54 : Apéro chez les voisins. Lumière écologiquement tamisée par l'ampoule économique projetant mon reflet sur le mur du salon. Mon cul dans le canapé. Un verre de rouge qui ne tache pas dans la main gauche. Le coude droit sur un coussin (attention, ce détail a son importance). Sensation étrange sous le coude gauche (nu). Regard oblique porté sur le coussin. La voisine : "Tu as vu ? il est beau le coussin hein ? c'est une création d'une copine, LM, tu connais ?" Moi (regard attentif sur l'oeuvre, merde une tache de foutre...) : "Heu... non" La voisine : "Tu as vu, c'est recouvert de latex, c'est choueeeeeette hein ?" Moi (soulagée, c'est pas un reste de la veille, c'est vrai merde, ça me ferait chier de savoir que mes voisins baisent encore sur leur canapé après 10 ans de vie commune) : "Oui" La voisine : "Si tu veux je te passe les coordonnées ?" Moi "Oui, ce serait super, merci" (Putain, c'est fou ce que dans la vraie vie, les dialogues peuvent être pourris...)

17 mai 2007 - 16h23: Bureau boulevard Saint-Germain. La voisine en face a encore ouvert sa fenêtre, reflet du soleil en pleine gueule. Fouille en règle dans mon portefeuille. Je mets enfin la main sur l'addition. Note de frais à remplir.  Tiens c'est quoi ce post-il violet en forme de coeur putain fais chier la vioque. Ah oui, la voisine (non pas la vioque). Je pince le post-it dans ma pince-faut-pas-que-j'oublie.

9 juin 2007 - 10h57 : Bureau boulevard Saint-Germain. Lumière grise en accord parfait avec les toits de zinc. C'est beau. Recherche d'une idée. Regard implorant vers le ciel, rien ne vient (putain d'existentialistes, si tu merdes tu ne peux que t'en prendre à toi-même). Regard descendant sur le familier bordel de mon bureau. Regard tombant sur le post-it violet. Oui pourquoi pas. Saisie du nom dans le moteur de recherches googleien. LM a un site internet. Putain c'est beau. Délicat. Original. Revue de presse Elle-y-séenne. Yes ! Un frisson remonte le long de mon épine dorsale, si j'avais une queue, elle frétillerait... Je tends le bras vers le téléphone. Messagerie. Je laisse un message. Bonjour j'adore ce que vous faites, bla bla bla, rappelez-moi. Elle me rappelle. Oui faire un livre bonne idée. Oui on peut prendre RDV. Oui la semaine prochaine. Oui, j'aime que l'on me dise oui.

16 juin 2007 - 14h30. Bureau boulevard Saint-Germain. Lumière automnale. Première rencontre. Brune qui a du chien. Habillée branchée ça ne m'étonne pas. Présentations. Spontanée. Disponible. Enthousiaste. La vie est belle. Le projet s'esquisse. Cette fille a une idée à la seconde. L'éditrice calme le jeu (remarquez le dédoublement, elle n'est pas je, elle est payée pour obtenir un max avec une mise minimale) : nombre de projets, de pages, qui fait les croquis, les photos, oui vous pouvez fournir le photographe s'il s'aligne sur nos prix, pas de stylisme trop cher, oui je sais les photos sont moins belles, mais la contrainte force l'intelligence si si, oui mon boss n°4 est auvergnate. LM est contente de faire un livre, elle n'aurait pas eu l'idée toute seule. Oui, merci je sais, je sert aussi à ça.

23 juin 2007 - 11H00. Bureau du PDG. Lumière naturelle dans le dos. Face à moi boss n°1, boss n°2, boss n°3, boss n°4. Présentation de LM, point fort : book de presse de 10 kg, exposé du livre à venir (un sommaire manuscrit de 10 lignes, je brode, je souris, je cous, je souris, je reprise, je souris), étude de la concurrence. Oui, c'est d'accord. Sous réserve que le CEP soit accepté of course. Je souris.

30 septembre 2007 - pas de montre. Bureau toujours au même endroit. Lumière grise je devrais éclairer. Pas de nouvelles de LM. Pas de chapitre d'essai promis pour septembre. Pas de sommaire définitif. On s'est vues en août. Sourire aux lèvres. Présentation de sa co-auteure. D. Je n'en connais que le prénom. Ombre de LM. Petite main de LM. Jaillissement d'idées. C'est beau les créatrices. ça pétille. C'est vivant. C'est libre. Souvent fauché. Mais papa et maman sont là. Formées à l'école Duperré. Elevées pour avoir des idées.  Septembre et pas de nouvelles. Ah si ! la voisine m'a dit qu'elle avait dîné chez LM. "Super speed la chérie". LM me file entre les pattes. LM me fuit. LM n'a pas le temps. Avoir des idées pour elle lui rapportera beaucoup plus qu'en avoir pour les éditions XYZ. Je lui offre quoi ? 6 % de droits d'auteur ? sur un livre vendu 20 euros ? moins la TVA  (5,5 % la TVA sur le livre...), si elle vend 4000 ex. elle gagne combien ? Mesdames et messieurs, à vos calculettes, merci de m'envoyer vos résultats sous forme de commentaires, le premier à répondre gagnera un an d'abonnement à ce blog ! Elle gagnera quoi ? l'équivalent de 10 coussins signés LM. Mais bon, merde, un livre est un livre, non ? Un livre, c'est la classe non ? Un livre c'est une consécration, non ? Y'en a qui payent pour se faire éditer (cher auteur potentiel : ne jamais payer pour se faire éditeur, cela s'appelle une arnaque)...

Aujourd'hui : E-mail de LM. LM a dit non.

Demain : J'appelle LM.


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Commentaires
E
@ makuramis : le pire c'est que je la comprends... l'idée du livre est toujours séduisante, qui dirait non à une éditrice vous proposant de vous publier ? mais ensuite, il faut se poser, s'assoir à une table, seul face à une page, seul face à soi, et ça, ce n'est pas donné à tout le monde...
M
tellement d'énergie qu'on dirait fouttue en l'air. créer, monter, défendre ce projet bec et ongle. pour finalement n'être qu'une simple fourgue à rêve de gloire éditorial, son shoot gratos. de quoi mettre la rage ! donc, ça arrive de ce côté de la barrière aussi ? <br /> Merci d'être cette voix-là, celle de l'édition.<br /> <br /> makuramis<br /> photographe
E
@ Jacques : c'est vrai que cela peut sembler peu, mais il y a tant de frais pour éditer un livre... merci pour votre message qui me fait réaliser qu'un billet sur le prix du livre ne serait pas du luxe ;-) à venir, très vite... le temps que je réapprenne à faire de jolis camemberts colorés...
J
6% sur le HT ? C'est pas aussi un peu de l'arnaque ? ;-)
E
elle a répondu peut-être
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